vendredi 27 février 2009

Part III - 1.

Pourquoi ne m’as-tu pas serré plus fort ? Pour m’empêcher d’avoir peur… Pourquoi ne m’as-tu pas regardé dans le noir pour me dire « tu existes, c’est toi » ?

Maintenant les mots guérissent et la distance rassure. Mais les regrets du « si » émergent. Comme à chaque fois. Je t’aime. Parce que tu es le seul qui me l’a proposé. Qui me le permet. Qui me répond. Le seul aujourd’hui.

Demain peut-être qu’un autre viendra. Mais loin. Et ainsi de suite…

J’annonce le temps de la lucidité et du grand Pardon. Tu n’es plus là pour l’entendre. C’est seulement pour moi. Question de justice.

Tu me manques. Ton regard, ta présence me manquent. Eux seuls me faisaient exister. Aujourd’hui, il n’y a encore personne pour te remplacer.

Je les voie, tous, qui me regardent. Le temps a fait leur indifférence, ou juste la distance. Mais moi, j’ai le poids de tous ces regards. Je trimballe tous ces morceaux de vie comme des ratés. Je me torture le bas du ventre à me les rappeler, à les convoquer tous ensemble comme un carnaval morbide et lunaire, tâché de sang et de poussière.

Je courbe l’échine, silencieuse. Je porte le fardeau de toutes ces décisions, sans parfois même les comprendre ou les justifier. Elles sont seulement. Est-ce qu’il en va de même pour toi ? Pour tout ? Pour moi ?

Je voudrais encore que tu l’entendes, que tu m’entendes. Masi tu es déjà si loin. Et je souffre de n’être plus qu’une absence, de ne plus dessiner sur ta carte mes courbes à moi. Il va falloir que je reconstruise, que je rêve à nouveau. C’est encore toi quand je ferme les yeux. Mais tu ne viendras plus.

mercredi 25 février 2009

Part II - 5

Maintenant, c’est à elle de dire, de parler, d’écumer le silence de paroles sensées, raisonnées. Elle se prend au jeu. A chaque mot, elle prend conscience un peu plus de la force de son être. Elle peut refuser. Dire non, courir loin d’ici, le planter lui et ses démons, l’abandonner aux charognes de son esprit. Le faire souffrir et payer sa faute.

Et pourtant, son regard se porte ailleurs, loin derrière lui. Il y a tout un monde à désirer derrière. Un monde avec ou sans lui. Un monde où le mot « deux » se perd et se noie.

« J’ai perdu. »


mardi 24 février 2009

Part II - 4

"J’ai perdu mon être qui me peuplait à l’intérieur de moi. Il a déserté devant la douleur, foutu le camp comme une merde. C’est ce que je suis à présent : un corps vide traversé d’un trou d’air. Une fin du monde en soi. "

Elle sait que c’est en cela que réside sa chance. Quand il n’y a plus rien.

mercredi 18 février 2009

Part II - 3

Elle se retourne. Lui demande de parler. Lui demande de raconter même si elle sait que chaque parole prononcée sera une autre fin du monde. Le début d’un film qui va tourner dans sa tête encore longtemps, la rongeant peu à peu comme une vieille charogne, la vidant de son être, l’humiliant chaque fois un peu plus. Mais elle écoute et creuse les mots en elle. Comme pour être sûre. Elle ne bouge toujours pas.

« Tu es là calme, et tu me regardes. Je voudrais me jeter entière sur toi et te décapiter, t’arracher ta sale caboche qui se tient obstinément droite, te retirer ces yeux qui me regardent fixement et ne me laisse pas m’échapper. Je voudrais pouvoir te fuir, sauter hors de ce lieu qui est le nôtre, courir droit vers le nulle part. Mais je ne peux pas. Je sens l’obstacle qui bute contre moi. Et moi, je voudrais seulement fermer les yeux, te laisser à tes paroles que je ne comprends pas, que je ne veux pas comprendre, que tu maîtrise trop bien, qui ne sont pas les miennes. Je pars pour l’autre monde. Celui où je retrouve mes cris d’avant, mes hurlements du bas du ventre, mes tâches de sang qui giclent sur les murs. Et ta voix continue d’être là. Je n’en veux pas, entends-tu ? Je ne veux pas de toi en cet instant, juste trouver l’espace de hurler et puis peut-être après, pleurer. Je t’aime. Non, je ne l’ai pas dit. Tu ne l’entendras pas. »

Il continue de parler. D’expliquer. A nouveau elle ne bouge plus. Comme morte. Une poupée de chiffon trop longtemps traînée sur le sol et devenue toute sale avec des trous partout.

lundi 16 février 2009

Part II - 2.

Il est là. Il l’a ramasse. Doucement. Comme on ramasse un oiseau mort. Il la dépose au creux du lit. Son corps se contracte pour ne pas bouger, ses yeux luttent pour ne pas s’ouvrir. Elle ne veut pas avoir à le regarder. Pas encore. Il a compris. Se déshabille lentement du côté de son lit et s’allonge. Il garde les yeux ouverts. Il ne veut pas mentir dans le sommeil.

Elle chuchote. Il comprend. Il acquiesce. Silence. Elle n’a plus de mot. Elle n’ouvre toujours pas les yeux. Dos à lui. Elle ne sait pas comment faire. Chaque mot qu’elle dira, elle veut le sentir et le peser en elle comme un lourd fardeau. Elle sait que c’est à elle de décider. Même si elle n’a rien demander. De son corps lasse et inerte, elle lutte contre ce choix qu’elle n’a pas commandé, désirer, qui s’impose à elle par la faute de l’Autre. Elle refuse. Elle ne peut pas.

« Je ne veux pas crier. Je serre les dents, plante mes crocs dans le silence, acharnée à ne pas lâcher. »

mercredi 11 février 2009

Part II - 1.

Elle fume. Seule. A peine habillée. Comme sortie du lit en pleine nuit, les doigts grignotant le bord de la table. Assise au bord du fauteuil, tassée dans son corps comme si elle n’osait plus penser.

Elle voudrait se lever, ignorer le temps qui passe et inexorablement lui annonce le glas d’une rupture. Sa fin du monde à elle. Trouver la force de bouger. Elle se lève. Va vers la grande fenêtre, celle par laquelle le soleil entre le matin. Quand arrivera-t-il ? Il n’y a personne, que le silence. Elle voudrait hurler pour rompre cette absence, se saisir des meubles et les jeter les uns sur les autres, exploser de ses cris les murs où s’enferme sa détresse.

Mais elle ne bouge pas.

Viendra-t-il ?

Elle ne pourra pas ignorer. Elle sait. Et c’est cette certitude sans équivoque qui lui tiraille l’intestin et l’empêche de continuer à bouger.

Une nouvelle cigarette. Pour s’occuper. Le temps d’un instant concentrer sa pensée sur la flamme qui vient brûler. Elle voudrait tant pouvoir se faire du mal. Mais elle attend. Pour entendre.

« Tant que le jour ne se levait pas, tu pouvais encore revenir. Maintenant, il est là, et tu n’es pas rentré. Je ne peux pas l’ignorer. »

Elle s’est endormie. Se tassant sur le sol pour y puiser une force qui ne s’y trouve plus, les poings plantés dans son bas-ventre comme pour empêcher un hurlement d’en sortir. Elle ne s’est pas détruite. Juste endormie, épuisée.

mardi 10 février 2009

Part I - 9.

Plus calme, un peu comme après la course. Pour longtemps, comme si c’était simple. Demain viendra le temps des assassins mais je n’en ferais plus partie. Il sera trop tard.

Il n’est plus libre le petit cheval noir, en proie à la douceur de son regard.

Alors je lui dis. J’ai regretté l’averse. J’ai regretté le temps. Je suis là désormais à compter les jours qu’ils me restent comme s’ils étaient déjà perdus. Quand deviendrons-nous amants ?

J’ai mal débuté, trop tôt. Ils ne savaient même pas m’appeler. Comme une symphonie peut-être ? Un boléro ? Alors j’ai été dans le débordement. Un petit être accroché à tous les barreaux de chaises, à ne jamais vouloir quitter.

Jusqu’au grand Non : celui de ma vie, celui de mes feuilles, celui de ma nuit peut-être. Ils se sont déchirés pour le propre sang. Je préfère oublier que la haine est le prix de la vie. Plus rien désormais ne s’oublie.

Tu es là, encore, à m’attendre. Et je viens. Seule cette fois. Je n’ai plus rien. Alors regardes-moi comme ça. Nue et lavée pour la première fois. Regardes : le vide s’étend devant moi. Et pour la première fois, je n’ai plus peur de m’y étendre. Même soulagée qu’il existe. Enfin.

On va où ? Peut-être ne viendrons-nous pas …

lundi 9 février 2009

Part I - 8.

LUI : Comme ça, tout simplement.

ELLE : Je vois.

LUI : Non.

jeudi 5 février 2009

Part I - 7.

ELLE : Est-ce qu’il faut être dans le calme pour dire vrai ? Est-ce que le vrai a besoin de silence ? Est-ce que les cris l’enfonce, le défigure, le terrifie au point qu’il ment ?

Je suis si simple, si tu savais… Et puis même là, dans le calme, je finirais par mentir. Délit de culpabilité je crois. Je n’y arriverai certainement pas.

mercredi 4 février 2009

Part I - 6.

ELLE : Tu es là ?

LUI : Comme toujours. Je t’attends.

ELLE : Je ne viendrai pas.

LUI : Je sais.

ELLE : Pas encore.